YOGA SUTRAS

Yoga-sûtras de Patañjali

(La traduction proposée ici est, en majorité celle de Jean Papin, issue de l’ouvrage La voie du yoga aux éditions Dervy . D’autres traductions sont fréquemment proposées en complément à la sienne : Celle de F. Mazet issue de l’ouvrage Yoga-sutras ,éd. Albin Michel ; celle d’E.Sablé issue de l’ouvrage Les yoga-sutras de Patanjali à la lumière des premiers commentaires indiens , éd.Dervy, et celle de P.S. Filliozat issue de l’ouvrage Yogabhasya de Vyasa , éd. Agamat )

I DE L’UNIFICATION (SAMADHI PADA)

  1. Voici l’enseignement traditionnel du yoga
  2. Le yoga consiste à suspendre l’agitation psychique et mentale
  3. C’est alors que le Voyant (le suprême Témoin, le Soi, le Purusha) est établi dans sa propre et véritable nature.
  4. Autrement, il s’identifie aux mouvements des opérations mentales.
  5. Ces dernières présentent cinq sortent de modifications, causant douleur ou non :
  6. Connaissance juste (pramana) ; non discrimination (viparyaya) ; opinions personnelles ( vikalpa) ; inconscience du sommeil ( nîdra) ; mémoire (smritaya).
  7. Les preuves d’une connaissance juste sont la perception sensorielle directe, la déduction par inférence, l’enseignement traditionnel.
  8. La non-discrimination aboutit à une connaissance erronée parce qu’elle n’est pas fondée sur la vraie nature des choses.
  9. Les opinions personnelles proviennent de l’attribution d’une valeur à des mots privés de sens réel et sans objet.
  10. Le sommeil avec rêve (vrittisnidra) est un état qui s’appuie sur une expérience qui n’existe pas. ( ou qui entraîne l’absence de connaissance). 
  11. La mémoire est la persistance des impressions laissées par les objets perçus dans la substance mentale.
  12. La suppression de ces états de conscience s’obtient par la pratique intense (abhyasa) et le non-attachement (vairagya). 
  13. Mais l’exercice exige un effort soutenu 
  14. Il deviendra efficace s’il est poursuivi longtemps avec constance, dévotion et enthousiasme. 
  15. Le non-attachement consiste à écarter le désir des objets sans cesse offerts à notre vue ou à nos sens, et à s’en libérer totalement. 
  16. Le degré ultime de détachement est l’intuition directe du Soi par le rejet des trois fonctions inhérentes à la manifestation (les 3 gunas). 
  17. l’enstase (Samadhi) appelée «connaissance différenciée ou avec support» est celle de l’argumentation ou réflexion (Vitarka) sur les éléments grossiers (Mahabhuta) de l’investigation ou discrimination (Vicara) sur les éléments subtils (Tanmatra), de la félicité (Ananda) et de l’abandon de la notion d’ego (asmita). 
  18. Il existe une autre sorte d’enstase obtenue par l’arrêt total de l’activité mentale et où subsistent seulement les impressions résiduelles (Samskâra : traces inconscientes des actions passées). 
  19. Mais il arrive que cette forme aboutisse imparfaitement et soit l’origine de la voie des Dieux et des êtres désincarnés qui s’immergent dans la Substance Primordiale. (Prakrti) 
  20. Les autres hommes obtiennent le Samadhi par la foi (shradda), la détermination (vîrya), l’activité de la mémoire (smriti), l’unification et le discernement de la réalité ( prajna). 
  21. Ce but est atteint par ceux qui s’y appliquent avec ardeur. 
  22. Donc la rapidité du succès est fonction de la mollesse, de la demi-mesure ou de l’ardeur de la pratique. 
  23. Ou bien on peut l’atteindre par l’abandon total au Seigneur Suprême (Ishvara pranidhana). 
  24. Le Seigneur est le Soi transcendant. Les afflictions, les actions avec leurs conséquences et les traces subconscientes laissées par elles ne l’atteignent pas. 
  25. En Lui le germe de toute connaissance devient infini. 
  26. Même pour les anciens et les dieux originels, il reste le Maître, car il n’est pas lié par le temps. 
  27. On le perçoit par le son de la syllabe (ou Pranava) OM. 
  28. La répétition de la syllabe OM dévoile sa signification et sa nature essentielle. 
  29. Par cette pratique, nous obtenons la révélation de notre être profond et les obstacles s’évanouissent. 
  30. Ces obstacles qui perturbent le mental sont la mauvaise santé (vyâdhi), les difficultés matérielles (styâna) , le doute (sanshaya), la négligence(pramâda)ou irrégularité de la vie, la paresse (âlsya), la sensualité, entraînant le manque d’enthousiasme pour la pratique (avirati), les idées fausses (bhranti darshan), l’impossibilité d’atteindre la concentration et de s’y maintenir. 
  31. La souffrance physique, la dépression, le tremblement des membres et la respiration anarchique accompagnent cette distraction de l’esprit. 
  32. L’exercice répété (abhyasa) de la concentration sur un seul point (eka grata) permet d’écarter ces écueils. 
  33. La sérénité de l’esprit (prasada) s’installe lorsque, devant les événements tristes, bons ou mauvais qui se présentent, nous réagissons par l’amitié, la compassion, la paix, la joie et le désintéressement. 
  34. Ou bien par la suspension du souffle expiré (pranayama). 
  35. la stabilité du mental vient aussi en se concentrant volontairement sur les objets perçus par les sens. 
  36. Ou bien en méditant sur l’état lumineux au-delà de la souffrance. 
  37. Le mental peut aussi prendre pour objet de concentration un être libéré du désir. 
  38. Ou encore en prenant comme support la connaissance née dans le rêve (svapna)ou dans le sommeil profond(nidra). 
  39. On la provoque également par la méditation sur un quelconque objet qui exerce une attirance heureuse. 
  40. insi on établit le contrôle sur toute chose, depuis l’atome jusqu’à l’infiniment grand.
  41. Quand cessent tous les mouvements de la pensée et les impressions du subconscient, l’esprit ressemble au plus pur cristal ; le sujet, l’objet et l’instrument de la connaissance coïncident : c’est l’unification (samapatti). 
  42. Lorsque le son émis, la signification et la connaissance se juxtaposent exactement, on obtient l’unification qualifiée d’argumentative (savitarka). Ou : Le savitarka est un état spirituel mêlé de connaissance mentale, basée sur la signification des mots. 
  43. Que l’on supprime les fonctions de la mémoire et que l’objet de la concentration brille en lui-même, on parvient alors à l’unification appelée non-argumentative (nirvitarka). 
    Ou : La mémoire ayant été purifiée, comme vidée de sa substance l’état d’unité sans raisonnement (nirvitarka) ne s’intéresse alors qu’à l’objet lui-même, libre des connotations mentales. 
  44. Cet état de fusion permet alors à la conscience d’appréhender la réalité subtile des choses, même sans activité mentale. 
  45. La perception la plus fine s’arrête au dernier état potentiel de la manifestation ( Pradhana ou Prakriti). 
  46. Telle se présente la série des modes de concentration dite « avec semence ». 
  47. L’expérience d’enstase (Samadhi) sans discrimination(ou sans activité mentale) induit un état intérieur de paix et de clarté. (Mazet) 
    Ou : l’enstase sans discrimination étant acquise, la Paix du Soi se reflète dans l’esprit dégagé de la pensée. (Papin) 
  48. Là est la connaissance de la réalité.(Mazet) 
  49. Elle est supérieure à celle issue des écritures ou des inférences concernant les choses ordinaires. (Papin) 
  50. L’impression laissée par cette expérience efface toutes les autres traces subconscientes. (Papin) 
  51. Si enfin on supprime cette dernière impression, toutes sont abolies. L’enstase « sans semence » survient alors. (Papin)

II DU CHEMIN SPIRITUEL (SADHANA PADA)

  1. Le travail préliminaire (Kriya yoga) comprend l’ascèse(tapas), l’étude des Ecritures ou récitation des formules sacrées (svadhyaya) et l’abandon au Seigneur suprême (ishvara pranidhana). 
  2. Ceci facilite l’accès à la réalisation( Samadhi) et réduit les causes de souffrance. 
  3. Ignorance(avidya), affirmation de la personnalité(asmita), désir(raga), aversion (dvesha), attachement à la vie ou peur de la mort(abhinivesha) ; voilà les cinq afflictions. 
  4. l’ignorance est la source des autres souffrances(kleshas), quelque soit leur état, assoupi, atténué, masqué ou déployé. 
  5. La nescience repose sur la confusion entre le transitoire et l’éternel, le pur et l’impur, le tourment et le bonheur, l’impermanence et la stabilité du Soi. 
  6. Le sentiment de l’individualité(asmita) se dévoile quand on s’identifie aux moyens de perceptions.(Papin) 
    Ou : Le sentiment de l’ego vient du fait que l’on identifie le spectateur et le spectacle.(Mazet) 
  7. L’attachement a sa racine dans l’attrait du plaisir.(Papin) 
    Ou : le désir de prendre(raga) est lié à la mémoire du plaisir(Mazet). 
  8. la répulsion (ou le refus) à la mémoire de déplaisir. 
  9. Enfin, on sait très bien que, même chez les plus avertis, l’amour de la vie n’est qu’un flot de complaisance envers soi-même. 
  10. Toutes les souffrances doivent être résolues en remontant jusqu’à leur source et détruites ; 
  11. Et la méditation (dhyana) éliminera les tourbillons mentaux qu’elles occasionnent. 
  12. Ces tourments laissent une foule d’empreintes qui conditionnent cette vie et les suivantes.(Papin) 
    Ou : Au cours des naissances successives, on expérimente la loi du karma, qui trouve ses racines dans nos afflictions .(Mazet) 
  13. Tant que la racine est là, le développement des souffrances (kléshas) se fait au cours des naissances, de vies et d’expériences différentes (Mazet) 
    Ou : Il s’ensuit une inévitable série de conséquences : hérédité, longévité, expérience du plaisir et de la douleur(papin) 
  14. Apportant leur fruit de joie ou de peines, nées des vertus ou des vices. 
    Ou :Ces maturations ont pour fruit le plaisir ou la douleur selon qu’elles ont pour cause le mérite ou le démérite. (Filliozat) 
  15. Tout est vraiment souffrance pour celui qui sait. Tout évolue vers elle. Toutes nos tendances innées s’y acheminent. Toutes les forces contradictoires de la nature y aboutissent.(papin) 
    Ou : Pour le sage, tout est douleur, parce que nous sommes soumis aux conflits nés de l’activité des Gunas et à la douleur inhérente au changement, au malaise existentiel, au conditionnement du passé.(Mazet) 
  16. Ce qui est à éliminer est la douleur à venir(Filliozat) 
    Ou : C’est pourquoi il faut rejeter par anticipation les tourments à venir. Papin) 
  17. Les afflictions germent dès que le Voyant, le Soi, et le manifesté se conjuguent. On doit donc éliminer cette cause.( Papin) 
    Ou : L’identification entre celui qui voit et ce qui est vu constitue la cause première de la douleur qui peut être évitée. (Mazet) 
  18. Ce qui appartient au manifesté (ou conditionné) est un mélange des modalités de clairvoyance, d’activité volontaire et d’inertie, un composé des objets des sens et de l’entendement. Son but est la jouissance , mais aussi la délivrance. (Papin) 
  19. Ce qui est différencié et ce qui ne l’est pas, l’intelligence que l’on distingue et la conscience pure, sans attributs, désignent les états des trois fonctions de la Manifestation (Gunas) 
    Ou : l’activité des Gunas se manifeste à des niveaux différents sur des éléments grossiers ou subtils, manifestés ou non. (Mazet) 
  20. Tout en restant pur et inaltéré, le Soi connaît du dedans, par réflexion dans l’intelligence (Papin) 
    Ou : Bien que pure conscience, le Témoin (le Soi) semble voir à travers la connaissance distincte. (Sablé) 
  21. C’est pour sa libération que le monde existe. Ou : La raison d’être de ce qui est vu est seulement d’être vu. (Mazet) 
  22. Pour celui qui atteint le but, l’univers tel qu’on l’éprouve est aboli. Mais pour les autres, il ne cesse pas de fonctionner. 
  23. De l’amalgame des Pouvoirs respectifs de la Nature et de son maître, le Soi, résulte la perception ordinaire ; 
  24. L’ignorance en est la cause ; 
  25. Et quand elle s’efface, cette relation disparaît pour faire place à l’autonomie(kaivayam) de la conscience de l’Être . (Papin) 
    Ou : Quand la non-connaissance du réel disparaît, disparaît aussi l’identification du spectateur et du spectacle. Alors le spectacle n’a plus d’existence. C’est la libération du spectateur. (Mazet) 
  26. Cela s’obtient par une discrimination permanente et sans faille. 
  27. Celui qui y parvient franchit les sept étapes des plans supérieurs et accède à la connaissance de la réalité. 
  28. Grâce à la pratique assidue de tous les niveaux du yoga, l’impureté s’annule et la lumière de la connaissance s’intensifie jusqu’au discernement le plus complet. 
  29. Il y a huit degrés : -les réfrènements (Yama) -Les disciplines( Niyama) -La posture (Asana) -Le contrôle du souffle (Pranayama) -Le retrait des sens ou l’écoute intérieure (Pratyâhâra) -La concentration (Dhâranâ) -La méditation (Dhyâna) -l’identification ou état d’unité (Samadhi) 
  30. Non-violence( ahimsa), véracité( satya), absence de vol ou désintéressement (asteya), continence ou modération (brahmacaryâ), pauvreté ou refus des possessions inutiles (aparigrahâ), tels sont les réfrènements (Yama). 
  31. C’est la grande observance à appliquer sans restriction de race, de lieu, de temps et en toutes occasions. 
  32. Purification (Shauca), sérénité (Samtosa), ascèse (Tapas), étude des Ecritures (svadyâya) et abandon total au Seigneur suprême (Ishvara pranidhâna) constituent les disciplines (Niyama). 
  33. Afin d’écarter le trouble que fait naître le doute, on doit s’exercer à l’implantation de la pensée contraire. 
  34. Ces pensées comme la violence, qu’on la vive, la provoque, ou l’approuve, sont causées par l’impatience, la colère et l’erreur. Qu’elles soient faibles, moyennes ou fortes, elles engendrent une souffrance et une confusion qui n’ont pas de fin. Méditer sur le contraire empêche cela.(Mazet) 
  35. En présence de celui qui a adopté la non-violence tous les êtres renoncent à l’inimitié. 
  36. Celui en qui la véracité s’est établie obtient et maîtrise le fruit de ses œuvres. Ou : Quand on est établi dans un état de vérité, l’action porte des fruits appropriés. (Mazet) 
  37. Celui qui prend pour règle la totale honnêteté voit les richesses venir à lui. 
  38. Celui qui pratique la continence acquiert et contrôle l’énergie vitale. 
  39. Enfin celui qui respecte une stricte pauvreté se souvient de ses vies antérieures. 
  40. La purification provoque l’indifférence à son propre corps et l’absence de contact avec autrui. (ou à être détaché de notre corps et de celui des autres). 
  41. On y gagne en outre la pureté lumineuse et la paix du mental, la concentration, la conquête des sens, la capacité de réaliser l’âme universelle (atman). 
  42. La sérénité (samtosa) procure le bonheur parfait. 
  43. L’ascèse (tapas) donne des pouvoirs spéciaux au corps et aux sens. Elle détruit l’impureté. 
  44. L’étude des Ecritures et des formules sacrées nous permet le contact direct avec notre divinité tutélaire (Ishta devata). 
  45. Et si on s’abandonne complètement au Seigneur suprême, on parvient à l’enstase (samadhi). 
  46. La posture doit être stable et agréable. 
    Ou : la posture (asana), c’est être fermement établi dans un espace heureux.(Blitz) 
  47. C’est en se concentrant sur l’infini que l’on calme l’agitation physique. 
    Ou : La stabilité et l’aisance de la posture se réalisent par la méditation sur l’infini et le relâchement des tensions.(Sablé) 
    Ou : Il y a assiette (asana) par un relâchement de l’effort et par la transformation en Ananta. (Filliozat)
  48. Grâce à cela, les couples d’opposés (ou le jeu des contraires) cessent de nous assaillir.
  49. .Après avoir assimilé la posture, on en vient au contrôle du souffle (pranayama) qui consiste à arrêter les mouvements d’inspiration et d’expiration. 
    Ou : Quand il y a assiette, le contrôle du souffle est l’arrêt du mouvement d’inspiration et d’expiration. (Filliozat) 
  50. Ces mouvements de l’énergie respiratoire, vers l’extérieur dans l’expiration, vers l’intérieur dans l’inspiration et bloqués dans la rétention, doivent être dirigés sur des points précis et réglés selon une cadence et sa répétition. Ils sont prolongés ou brefs. 
    Ou : Les mouvements de la respiration sont l’expir, l’inspir et la suspension. En portant l’attention sur l’endroit où se place la respiration, sur son amplitude et son rythme, on obtient un souffle allongé et subtil. (Mazet) 
  51. Enfin, dans une quatrième forme, le contrôle du souffle conduit au dépassement de la perception des objets extérieurs ou des visualisations intérieures. 
    Ou : Le quatrième contrôle du souffle est celui qui dépasse les champs externes et internes. (Filliozat) 
  52. Ainsi se lève le voile qui empêchait la clairvoyance. 
    Ou : Alors, ce qui cache la lumière (Prakasha) se dissipe. (Mazet) 
  53. Et désormais le mental gagne la capacité de concentration. 
    Ou : Et il y a aptitude de l’esprit aux fixations. (Filliozat) 
  54. Lorsque les sens se sont écartés de leurs objets et qu’ils se réduisent simplement à leur élément de conscience, cela s’appelle le retrait (pratyâhâra). 
    Ou : Quand le mental n’est plus identifié avec son champ d’expérience, il y a comme une réorientation des sens vers le Soi. (Mazet) 
  55. Alors les sens sont parfaitement maîtrisés.

III DE LA PUISSANCE DU YOGA ( VIBHUTI PADA)

  1. Etablir la fixation du mental sur un seul point, c’est la concentration (dhâranâ) 
  2. L’y maintenir dans un courant ininterrompu, c’est la méditation (dhyâna) 
  3. Quand disparaît la forme même de l’objet de la contemplation et qu’on saisit uniquement sa signification, c’est l’enstase (samâdhi) 
    Ou : Quand la conscience est en relation avec cela même qui n’a pas de forme, c’est le samadhi. (Mazet) 
    Ou :Lorsque l’objet de la méditation brille seul dans sa vraie nature essentielles, vide de forme, c’est le samadhi.(Sablé) 
  4. Coordonner les trois mouvements sur ce seul point, cela s’appelle la convergence (samyama). 
    Ou :L’accomplissement des trois est le samyama. (Mazet) 
  5. Et le succès dans cette triple voie révèle la connaissance. 
    Ou : Par la perfection de ce samyama, il y a la lumière de la connaissance supérieure (Filliozat). 
  6. Mais son application se fait par étapes. 
  7. Par rapport aux degrés précédents, cette triade constitue le stade dit « intérieur ». 
  8. Cependant, en comparaison de l’enstase « sans semence », elle reste une issue extérieure. 
  9. En supprimant les tendances à la dispersion, se manifestent celles de maîtrise et, sans perdre ses qualités, le mental obtient l’arrêt de ses modifications. 
  10. Il devient ainsi un fleuve de sérénité. 
  11. Ne plus donner libre cours à la multiplicité des phénomènes mentaux, mais soutenir la concentration sur un seul, aboutit à cette modification particulière qu’est l’enstase. 
  12. l’immobilisation de l’esprit a pour résultat l’équivalence des événements passés ou présents. 
  13. Ceci nous explique par ailleurs le mécanisme des changements formels, temporels et qualitatifs qui se produisent à la fois dans le monde de la matière et dans celui de phénomènes subjectifs. 
  14. Car la puissance manifestée conserve sa cohérence au travers de son évolution passée, présente et future. 
  15. Evolution dont la variété a pour cause le devenir. 
  16. Réussir « concentration-méditation et unification »(samyama) sur les impressions résiduelles des trois changements de forme, de temps et d’état, apporte la connaissance du passé et du futur. 
  17. Le mot énoncé, sa signification et ce qu’il représente sont habituellement mêlés ; mais si on établit concentration, contemplation et enstase sur ces éléments séparés, on obtient la connaissance de tous les langages et les cris du monde animal. 
  18. Quand on découvre les impressions enfouies dans le subconscient (samskâra), on a la révélation de sa vie antérieure. 
  19. La pratique de la « convergence » appliquée aux notions permet de connaître les états psychiques et mentaux des autres hommes. 
  20. Mais non leur substance mentale elle-même puisque la concentration ne la concerne pas précisément. Ou :Mais on ne connaît pas le centre : l’essence de l’être ne peut être objet d’investigation.(Mazet) 
  21. En dirigeant la même concentration sur la forme du corps, la puissance de perception d’autrui ne s’exerce plus, car le contact avec la lumière de ses yeux se trouve supprimé. Le corps devient donc invisible. 
  22. Si on l’applique au devenir, entamé ou latent, ou aux présages, on est exactement renseigné sur l’heure de la mort. 
  23. Si on applique samyama sur l’amitié et aux autres qualités, c’est la force occulte de ces vertus qui survient. 
  24. A la puissance de l’éléphant , par exemple, on obtient cette même puissance. 
  25. Se fixer volontairement sur la lumière intérieure apporte la connaissance de tout ce qui est subtil, caché ou lointain. 
  26. De la parfaite concentration sur le soleil découle la connaissance de l’univers, 
  27. de celle de la lune, la connaissance des constellations, 
  28. de celle sur l’étoile polaire, la connaissance des constellations, 
  29. de celle sur le centre ombilical, la connaissance de la constitution du corps, 
  30. de celle sur le creux de la gorge, la cessation de la faim et de la soif, 
  31. de celle sur le courant d’énergie situé au niveau du cœur(kurmanâdi), la stabilité du corps. 
  32. de celle sur la lumière au sommet du crâne, la vision des yogin doués des grands pouvoirs. 
  33. Mais on peut aussi tout connaître par l’illumination spontanée. 
  34. La contemplation sur le centre du cœur ou de la tête mène à la connaissance de l’esprit. 
  35. La modalité lumineuse du mental et le Soi sont totalement différents ; mais leur confusion provoque l’expérience du monde. On connaît le Soi en pratiquant la concentration sur sa signification propre, indépendamment de l’expérience sensorielle. 
    Ou : L’expérience sensible, tournée vers l’extérieur, ne distingue pas l’objet et le sujet, et confond complètement le Purusha et le Sattva. Si on l’oriente vers l’intérieur, grâce au Samyama, on connaît le Soi.(Mazet) 
  36. Cela a pour effet secondaire l’acquisition des pouvoirs occultes concernant l’audition, le toucher, la vue, la goût et l’odorat. 
  37. Jugés comme des perfections par le profane, ces pouvoirs sont des entraves à l’unification. 
  38. En réduisant la cause des liens qui asservissent l’esprit, on peut découvrir le passage pour se transférer dans le corps d’autrui. 
  39. .La conquête de l’énergie vitale de la toux et de l’expiration (udana), donne le pouvoir de flotter sur l’eau ou la boue, de marcher impunément sur les épines, de s’élever en l’air ou de mourir quand bon nous semble. 
  40. La maîtrise de l’énergie vitale de la digestion(samâna) fait apparaître un rayonnement lumineux. 
  41. La triade concentration-méditation-enstase appliquée à la relation entre l’oreille et l’espace vibrant (akasha) produit l’audition surnaturelle ; 
  42. appliquée à la relation entre le corps et l’espace vibrant et accompagnée de la méditation sur des objets légers comme le coton, elle permet le vol magique ; 
  43. appliquée aux modifications mentales séparées de l’influence extérieure des sens, on la nomme « grande désincarnation » et elle cause la levée du voile qui cachait la lumière ; 
  44. appliquée aux objets denses et subtils, à leurs principes essentiels et à leur exploration, elle donne la maîtrise des éléments. 
  45. C’est à ce stade qu’apparaissent les pouvoirs tels que devenir aussi petit qu’un atome, etc. Désormais les lois de la nature ne concernent plus l’adepte dont le corps est « glorifié ». 
  46. Charme, force, incorruptibilité du diamant, énergie, sont les caractéristiques de ce « corps glorieux ». 
  47. Se concentre parfaitement sur la perception des objets, sur leur forme propre, puis sur le sentiment d’individualité par rapport à eux et enfin sur la relation existant entre ces facteurs qui provoquent l’expérience, aboutit à la conquête des sens. 
  48. On acquiert ainsi la faculté de se déplacer aussi vite que l’esprit, de percevoir sans l’aide des organes sensoriels, et l’empire sur la Substance Primordiale (pradhâna). 
  49. Celui qui, par cette méthode, apprend à discriminer entre l’Etre et la fonction la plus pure du mental, devient tout puissant et conquiert l’omniscience. 
  50. Mais c’est en renonçant à ces pouvoirs surnaturels eux-mêmes que l’homme détruit l’imperfection dans son germe et atteint l’émancipation. 
  51. Car se complaire dans cette situation supérieure et céder à la convoitise et à l’orgueil, ce serait retomber dans le malheur. 
  52. Arrêter la contemplation sur la fraction la plus infime du temps et sur ses séquences antérieures et postérieures apporte connaissance et discernement continuel. 
    Ou : En effectuant samyama sur la succession des instants, on a la connaissance née de la discrimination au-delà du temps. (Mazet) 
  53. Ce que l’on ne décèle ni par l’espèce, ni par des signes particuliers, ni par la position, peut être révélé grâce au samyama. 
  54. ette sagesse suprême issue de la discrimination est délivrance et révélation absolue de toutes choses et de leurs modifications. 
  55. Quand la pureté de l’intelligence et du Soi coïncident, c’est l’émancipation définitive.

IV DE L’ÉMANCIPATION (KAÏVALYA PADA)

  1. Les pouvoirs occultes s’obtiennent : de naissance, par l’absorption de drogues, l’utilisation de formules hermétiques, la pratique des austérités ou par la concentration.
  2. Etre capable de prendre la forme d’une espèce autre que la sienne dépend de la faculté de pénétration dans la substance(prakriti).
  3. Le but n’est pas de bouleverser l’ordre de la Nature, mais d’écarter les obstacles à son évolution, à l’instar d’un cultivateur qui dégage son champ.
  4. C’est uniquement de la conscience de l’individualité que proviennent les esprits créés.
    Ou :Les différents états de conscience ne sont rien d’autre que création de l’égo(Mazet)
  5. Mais malgré leur nombre et leur différentes fonctions, un unique support mental les contrôle.
    Ou :Dans ces modifications de l’activité mentale, un seul état de conscience en entraîne d’innombrables.(Mazet)
  6. Et parmi eux, celui seul provenant de la contemplation est exempt de tout attachement.
    Ou :L’état de conscience qui naît de la méditation est libre de constructions mentales. (Mazet)
  7. Les actions d’un yogin ne sont ni blanches ni noires, alors que les autres hommes ont trois manières d’agir (blanche, noire, grise).
    Ou : Le karma du yogi n’est ni blanc ni noir, alors que pour les autres, il est de trois sortes.(Sablé)
  8. Ces actes ne laissent de traces subconscientes (vasanas)qu’en rapport étroit avec leurs qualités et leurs résultats
    Ou :Car nous sommes influencés par nos souvenirs subconscients liés à des imprégnations antérieures. (Mazet)
  9. En dépit des barrières de l’hérédité, du temps ou de l’espace, les imprégnations résiduelles (samskara) les plus lointaines ne perdent pas de leur intensité, car elles sont de même nature que la mémoire. 
    Ou :Même séparés par une nouvelle naissance, un autre lieu, un autre temps, ces samskaras demeurent car ils sont de même nature que la mémoire.(Sablé)
  10. On les dit sans commencement à cause de la permanence du désir. 
    Ou : Ces vasanas n’ont pas de commencement car le désir de vivre est éternel.(Sablé)
  11. Ces empreintes subconscientes(vasanas) persistent en raison du maintient de leurs cause et de leurs effets ; en détruisant causes et effets, les empreintes s’effacent. 
    Ou : Les vasanas sont liés ensemble par un processus de causes et d’effets qui s’enracine dans une expérience. Lorsque celle-ci disparaît, ils disparaissent aussi.(Sablé)
  12. Passé et avenir existent par eux-mêmes, car l’expérience du monde est multiple. 
    Ou : Le passé et le futur suivent, par essence, des chemins différents, qui correspondent à leur dharma. (Sablé)
  13. Les phénomènes tout comme l’état potentiel dépendent intimement du dosage des trois propriétés de la Manifestation. 
    Ou : Manifestés ou subtils, ces trois aspects du temps sont de la nature des gunas.(Sablé) 
  14. L’unité des éléments(tattva)de l’évolution entraîne celle des principes de la création. 
  15. Les informations sensorielles varient par rapport à un même objet ; donc le mental et l’objet de l’expérience sont distincts. 
    Ou :Deux choses étant semblables, c’est à cause des différents états de conscience qu’on les perçoit différemment. (Mazet) 
    Ou : L’objet est identique en son essence, mais il est perçu de façon distincte à cause de la façon d’appréhender du mental (Sablé) 
  16. De plus, l’existence de l’objet ne dépend pas d’un seul observateur ; sinon le monde serait irréel. 
    Ou : Un objet n’est pas dépendant d’un seul mental. Si c’était le cas, que deviendrait-il lorsqu’il n’est plus perçu ?(Sablé) 
  17. Mais c’est l’imprégnation mentale qui détermine la connaissance ou la non-connaissance des choses. 
    Ou : Un objet est perçu ou non, selon que sa coloration répond à l’intérêt que manifeste le mental(Mazet) 
    Ou : L’objet est connu et non-connu du psychisme, parce que celui-ci cherche une coloration par lui.( Filliozat) 
  18. Les états de conscience sont toujours révélés par le Maître de l’esprit, le Soi, qui est immuable. 
    Ou :l’agitation du mental est toujours perçue par la conscience profonde, toute puissante, en raison de son immuabilité. (Mazet) 
  19. Cependant le mental n’est pas lumineux par lui-même, puisqu’il reste aussi un objet de perception. 
  20. Il lui est impossible d’avoir le discernement simultané de lui-même et de ce que les sens lui proposent. 
  21. Et en supposant qu’un autre mental le saisisse, il devrait alors exister une autre faculté de détermination pour appréhender l’intelligence (buddhi) ; il s’ensuivrait un excès d’incertitudes, aboutissant à la confusion de la mémoire. 
  22. Le principe de l’esprit, non sujet au changement, se reflète en lui, et c’est ainsi qu’il révèle l’intelligence. 
    Ou : La connaissance de la nature profonde survient lorsque la conscience cesse de passer d’un objet à un autre et s’identifie à sa propre forme immuable. (Sablé) 
  23. Imprégnée par le « Voyant », le Soi, et par le « vu »( le monde des phénomènes), la substance mentale peur tout saisir. 
    Ou : Le mental coloré par le Soi devient conscience totale.( Mazet) 
  24. Et bien que marquée par d’innombrables traces subconscientes (vasanas)dues à l’assemblage des modifications, elle a pour fin autre chose qu’elle-même. 
    Ou : Bien que coloré par d’innombrables vasanas, le mental est au service de Soi auquel il est associé et dont il dépend. (Sablé) 
  25. Pour qui découvre cette qualité spécifique, toute spéculation concernant l’existence de l’âme universelle s’arrête. 
    Ou : Pour celui qui est capable de discrimination cessent les doutes et les interrogations sur l’existence et la nature du Soi. (Mazet) 
  26. Le mental alors enclin à discriminer aborde l’état d’émancipation (Kaïvalya). 
  27. Mais les différentes impressions(samskaras) qui ont échappé à la perspicacité se réveillent aussitôt pour y faire obstacle. 
  28. Et leur abolition s’effectue comme celle des afflictions dont il a été parlé plus haut. (cf.II 10-11) 
  29. Quand on renonce aux fruits même de la connaissance sur l’essence des choses, le résultat de cette parfaite discrimination est appelée unification dans le « nuage de vertu ».(Dharma megha samadhi). 
  30. C’est à ce niveau que cessent la douleur et le conditionnement.(Klesha et karman) 
  31. La sagesse étant dès cet instant infinie, dégagée de toute souillure et de toute obscurité, il reste bien peu à connaître. 
    Ou : Alors, en regard de l’immensité de la connaissance libre de toute obscurité et de toute impureté, le domaine du savoir est insignifiant. (Mazet) 
  32. A cause de cela prend fin le processus de transformation des qualités (gunas) qui maintiennent l’activité du monde ; le but est atteint. 
    Ou : Et le processus de transformation des gunas arrive à son terme, leur raison d’être ayant été réalisé.(Mazet) 
  33. L’évolution se présente sous la forme d’un principe de succession perceptible seulement au terme de toutes les plus infimes séquences de fragmentation du temps par lesquelles elle passe. 
    Ou :Ce processus de changement qui se fait d’instant en instant, devient perceptible lorsqu’il s’achève. (Mazet) 
  34. L’involution retire aux fonctions de la Nature leur utilité vis-à-vis du Soi ; c’est l’état d’émancipation dans la quintessence du pouvoir de l’Etre. 
    Ou : La réabsorption des gunas, vidés de leur raison d’être, par rapport au Purusha, marque l’état d’isolement (kaïvalya) de la conscience dans sa forme originelle. (Mazet)

 

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